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Portrait - Anne-Christine Gouder, ingénieure agronome, CEO de Wild&Run

Vendredi 4 septembre 2020
En bref
Qui ? 
  Anne-Christine Gouder, 49 ans, ingénieure agronome (Ulg Gembloux).
Quoi ?  
  CEO de Wild&Run (2018), barres chocolatées home made à base de fruits et de noix.
Domaines d’expertise ? 
  Alimentation naturelle, nutrition sportive.

 

A la faveur d’une crise de la quarantaine et aussi d’une grosse faiblesse lors de l’ascension d’un sommet en Suisse, en 2014, Anne-Christine Gouder s’est posé les bonnes questions et y a apporté, à son rythme, des réponses en adéquation avec ses valeurs et ses passions. La start-up Wild&Run créée en 2018 en est l’heureux résultat.

Avant de se lancer dans la grande aventure, Anne-Christine Gouder travaillait chez Fevia, la fédération belge de l’industrie alimentaire. Epuisée par le rythme de travail d’alors, la CEO de Wild&Run se souvient avoir atteint, voire dépassé, ses limites. Son idée était de ne pas quitter son emploi trop vite afin de démarrer sa nouvelle activité en douceur. Mais quand elle est licenciée en juin 2018, elle n’hésite pas longtemps, même si l’entrepreneuriat ne fait pas partie de l’ADN de son entourage : « dans ma famille et celle de mon mari, il n’y a aucun entrepreneur. On n’a pas cette culture. On a décidé de tenter l’aventure en limitant les risques. Je me suis lancée avec un horizon à 3 ans, sur base d’un petit pécule très limité (10.000 euros), injecté sur la première année et demie. Mon mari m’a accompagnée pour tout ce qui était comptabilité. »

Tours et détours d'un parcours gagnant

Dès le mois d’octobre suivant, Anne-Christine Gouder participe au salon international de l’alimentation à Paris : « Je faisais partie des cinquante start-up européennes qui amenaient un produit innovant. Ca m’a propulsée, ç’a été un vrai kick pour lancer l’activité. » Faute d’un budget suffisant, l’entrepreneuse doit pourtant attendre car c’est un produit R&D (recherche et développement) à base de Jambon d’Ardenne : « Je souhaite m’assurer avant de le lancer sur le marché qu’il est tout à fait conforme d’un point de vue microbiologique et je n’ai pas encore le budget pour le faire.»

L'art de rebondir

Qu’à cela ne tienne, pour rassembler l’argent nécessaire à ce lancement, Anne-Christine Gouder décide de concevoir dans sa cuisine, encadrée par l’AFSCA bien sûr, le Chocoroc, un petit carré de 60 grammes 100% bio et responsable, destiné aux sportif·ve·s (2018). « J’ai vite compris, dit-elle, que le produit, composé de sucres rapides, de sucres lents et de lipides, plaisait sur le plan gustatif et qu’il était efficace ; les retours des sportif·ve·s étaient positifs. Seul bémol, le format. Une fois converti en barre de 30 grammes, le concentré d’énergie fait un tabac (2019). Si le but est de distribuer auprès des professionnel·le·s du sport, entraîneur·se·s, etc., l’entrepreneuse se limite pour l’instant au consommateur final, mais elle le voit comme une chance : « Ça m’a permis de me frotter aux client·e·s, d’avoir du retour dont des doléances, sur le goût, l’emballage. Je suis dans cette phase de création où l’on a encore beaucoup de flexibilité et de souplesse, où l’on peut écouter et réagir rapidement. C’est la force d’une start-up. » 

 

Seule, mais accompagnée

La CEO ne pense pas devoir faire appel à un financement. Dans son repositionnement, avancer calmement et consommer autrement occupent une place clé. « On a fait le pari, - et c’est une décision qui a été prise en famille -, de ne pas me verser de salaire les 3 premières années. » On sent bien que la force de ce projet est le soutien familial, outre l’opiniâtreté de la patronne. Mais il existe des obstacles : « Les difficultés principales sont la solitude et la gestion du temps. Je gère le bateau seule. Parler à quelqu’un fait parfois du bien, c’est pour cela que j’ai fait appel à différentes structures comme l’UCMCrea Job, le Smart Gastronomy Lab de Gembloux et Cap Innove à Nivelles, le réseau EEN. C’est indispensable pour échanger avec d’autres, avoir des idées, se faire aider. »

Indépendant·e·s mais résilient·e·s

L’autre difficulté, et toutes les entrepreneuses le soulignent, c’est le temps. Accepter de n’avoir plus d’horaire, de travailler parfois jusque à 22h, ou dès 6h du matin, le dimanche.

« Tout cela doit être conjugué avec la vie de famille, poursuit Anne-Christine. Il y a eu un ajustement à opérer. J’ai dû me dire « stop ». Les arrêts sont aussi nécessaires. »

Son conseil aux femmes ?  Ecouter ses tripes, Foncer. « En avril, au plus fort de la crise sanitaire, j’ai eu un coup au moral ; mes ventes se sont effondrées, je me suis dit mais quelle bêtise, je vais devoir retrouver un emploi. Mais depuis le 11 mai, ça redémarre et je suis même passée à la vitesse supérieure. Il y a dans toute situation difficile un apprentissage. Les indépendant·e·s sont résilient·e·s, ils/elles ont la capacité de se réinventer. »

Texte et photos : Véronique Pipers

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